– Le déclenchement de la Révolution du 1er novembre 1954 marque l’échec des gouvernements français successifs de faire de l’Algérie « une nouvelle province », a indiqué dans un entretien à l’APS l’historien français, Guy Pervillé.
« Pour un historien français, le 1er novembre 1954 est la date à partir de laquelle est devenu de plus en plus évident l’échec des gouvernements français successifs, depuis plus d’un siècle, à faire de l’Algérie une nouvelle province », a souligné ce spécialiste de l’Histoire du colonialisme, du nationalisme algérien et de la guerre de libération.
Pour lui, la date du déclenchement de la Révolution de Novembre 1954 représente « un échec particulièrement manifeste de la part des Républicains qui, après avoir proclamé en 1848 l’assimilation de l’Algérie à la République française, avaient rejeté la politique du +royaume arabe+, préconisée par l’empereur Napoléon III de 1860 à 1870, et qui avaient prétendu poursuivre une assimilation mythique en ignorant les réalités démographiques ».
En somme, a-t-il poursuivi, « la politique irréaliste suivie par la France de 1830 à 1962 en Algérie est l’un des plus grands échecs de son Histoire ».
« Pourtant en 1944, le Gouvernement provisoire de la République française (GPRF) siégeant à Alger, avait reconnu la nécessité de faire en sorte que les +Français musulmans+ d’Algérie deviennent des citoyens égaux en droit et en fait aux autres citoyens français d’Algérie et de France », a-t-il fait observer, relevant, toutefois, que « le programme de réformes politiques, économiques et sociales, adopté à l’époque par le GPRF, avait besoin de beaucoup plus de dix ans pour rattraper le siècle qui avait été perdu ».
Dans ce sillage, M. Pervillé a relevé qu’après le 1er novembre 1954, les dirigeants de la IVème République ont tenté de « mener, de front, la reconquête militaire et l’accélération des réformes, avant que le Général de Gaulle, rappelé au Pouvoir en mai 1958 pour +sauver l’Algérie française+ et la République, choisisse de retourner la politique suivie depuis plus d’un siècle en sacrifiant le mythe de l’Algérie française à l’intérêt national ».
S’exprimant sur les raisons qui empêchent la réconciliation des Mémoires entre l’Algérie et la France, cet historien a estimé que « la raison demeure toujours la même depuis plus d’un quart de siècle », citant notamment « la revendication de repentance de la France ».
Il a estimé que cela a « provoqué l’échec de la négociation du Traité d’amitié franco-algérien proposé par le Président Jacques Chirac », se référant à cet effet aux Mémoires de l’ancien président français qui avait dit en 2011 que +Le principal obstacle viendra de l’acte de repentance que le gouvernement algérien nous demande quelques mois plus tard de faire figurer dans le préambule, acte par lequel la France exprimerait ses regrets pour les torts portés à l’Algérie durant la période coloniale ».
Citant aussi le Président Chirac, il a indiqué que ce dernier avait écrit: « Ce qu’exigent de nous les autorités d’Alger n’est rien d’autre que la reconnaissance officielle d’une culpabilité. Je ne l’ai naturellement pas accepté ».
M.Perveillé a expliqué que les trois présidents qui ont succédé à Jacques Chirac « ont été confrontés plus ou moins ouvertement à la même revendication, mais sans résultat ».
Enchaînant sur les dernières sorties médiatiques du Président français, Emmanuel Macron, M. Pervillé a estimé qu’il est « très vraisemblable » que la conjoncture électorale « joue un rôle dans les déclarations du Président Macron, comme dans celles du candidat Macron en 2017 ».
Il a rappelé qu’en 2017, le candidat Macron « avait fortement sollicité la bienveillance des électeurs franco-algériens en qualifiant la colonisation de +crime contre l’humanité+, au risque de provoquer le ressentiment durable des défenseurs des +Français d’Algérie+ », ajoutant que « par la suite le Président Macron a voulu poursuivre la réconciliation avec l’Algérie tout en s’efforçant de donner des satisfactions aux autres groupes mémoriels rivaux qui coexistent en France ».