Il est parti très tôt, il est parti hélas sans jamais savoir que cette localité de Larbaâ Nath Iraten, terre de fierté et de dignité, le compte désormais parmi ses héros et que le nom de Djamel Bensmaïl sera, pour l’éternel, gravé en lettre d’or sur le monument dédié à ses valeureux martyrs. En effet, rien ne justifie et rien ne peut expliquer la mort aussi tragique et cruelle de cet enfant d’Algérie, cet artiste, cet amoureux de la vie et des autres, tombé en soldat du feu sur ces terres de haute Kabylie où il est venu guidé par la voix de son cœur pour porter secours à ses frères qu’il laisse derrière lui à jamais meurtris dans l’âme.
Non sans douleur ; non sans rage au cœur et non sans ces moultes interrogations qui torturent les esprits, Larbaâ Nath Iraten, qui demeure encore et encore abasourdie et désarçonnée par cet insoutenable crime, peine à présent de rassembler le peu de force qui lui reste pour inhumer, à l’issue de très courtes cérémonies, ses nombreuses autres victimes à côté, comme le recommande la tradition kabyle, des demeures des défunts qui sont pourtant toutes réduites en cendres.
Pas de discussions dans les villages des Ath Yiraten et de ses alentours, hormis cette effrayante et traumatisante actualité qui a vu des hommes, sans foi ni loi, livrer leurs âmes à la démence pour semer l’émoi et l’effroi au sein de cette paisible population Kabyle déjà impitoyablement affectée par la pandémie du Covid-19.
Qui n’a pas entendu Naa El Djouher at l’Houcine, cette frêle mamie presque centenaire qui a connu et subi les affres de la guerre coloniale, hurler sa douleur et sa colère devant la cruauté humaine qui a déferlé en furie sur un brave et innocent jeune homme qui a tout simplement voulu consacrer sa vie à la juste cause des siens ?
Combien sont ces hommes et ces femmes d’Ath Yirathen qui, dans le silence de leurs prières, regrettent profondément de n’avoir pas, en guise d’un ultime remerciement et d’un dernier au revoir, pu serrer, calciné fût-il, le corps de Djamel contre les leurs, comme pour se faire ainsi pardonner une horreur qu’ils n’ont jamais commise.
L’odieux assassinat de Djamel Bensmaïl reste sérieusement à élucider. Nous exigeons toute la vérité, l’âpre vérité sur cette inqualifiable mort de cet enfant du peuple qui fait couler encore les larmes de sang de sa Kabylie. Oui, sa famille comme l’ensemble des algériens ne peuvent se contenter d’une version d’une hypothétique vérité.
A présent, permettez-moi de sécher mes larmes par l’écoute de cette voix très ému du digne papa de Djamel qui, avec ses paroles profondément touchantes et remarquablement personnelles, nous invite, tout simplement à œuvrer à une Algérie réconciliée et tournée vers des lendemains meilleurs.
Repose-toi en paix, Djamal, notre enfant, tu seras toujours vivant dans nos yeux et nos cœurs.
YS