– L’hebdomadaire Jeune Afrique est plus que jamais à la merci du régime marocain, et la rupture des relations entre l’Algérie et le Maroc a montré comment « le journalisme de connivence » est devenu la norme chez les responsables du magazine.
Dans son édition du samedi, le quotidien Le Jeune Indépendant a consacré un long article sur l’un des « serviteurs des intérêts stratégiques » du Maroc en France, François Soudan, en l’occurrence, le directeur de la rédaction de Jeune Afrique et signataire d’un récent éditorial dans lequel il commentait la rupture des relations diplomatiques entre Alger et Rabat.
Ce vice-président du groupe éponyme éditeur, s’en est pris au ministre des Affaire étrangères Ramtane Lamamra. En effet, le titre: « Ramtane Lamamra, pompier ou pyromane ? » Ce titre interrogateur est juste une clause de style pour mieux suggérer soi-disant que M. Lamamra serait plutôt responsable d’envenimer les relations bilatérales déjà au point mort. Et François Soudan de s’appliquer par la suite à « décrypter » le communiqué par lequel le chef de la diplomate algérienne a annoncé, le 24 août, la rupture des relations diplomatiques avec le Maroc.
Le Jeune Indépendant observe que le courtier médiatique du Makhzen s’attarde, d’entrée de jeu, sur la phrase du communiqué qui dit qu’il est « historiquement et objectivement établi que le royaume du Maroc n’a jamais cessé de mener des actions hostiles, inamicales et malveillantes à l’encontre de notre pays et ce, depuis l’indépendance de l’Algérie ».
Pour tenter d’inverser les rôles, François Soudan souligne que le Maroc pourrait dire la même chose en affirmant que « ce serait plutôt l’Algérie qui aurait œuvré délibérément à placer la relation bilatérale dans une nouvelle impasse diplomatique »…
La suite de l’éditorial, François Soudan banalise notamment l’action entreprise par la représentation marocaine à New York qui a distribué un document dans lequel elle soutient un prétendu « droit du peuple kabyle à l’autodétermination ». Et il le fait pour mieux mettre sur le même pied d’égalité le soutien indéfectible et la position constante de l’Algérie en faveur du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
Alors même que le Premier ministre marocain s’applique à dire que cette position de son diplomate aux Nations unies n’est pas celle, officielle, de l’Etat marocain, l’éditorialiste complaisant de Jeune Afrique s’ingénie pour sa part à mettre sur une balance équilibrée une question de décolonisation (reconnue comme telle par l’ONU) et une entreprise de division territoriale de l’Algérie.
Il est allé jusqu’à justifier cette même position comme étant une réaction logique à ce qu’il a considéré comme étant de la part de l’Algérie une « réactivation » du conflit du Sahara occidental à travers les manifestations des Sahraouis à Guerguerat, théâtre d’une agression marocaine, le 13 novembre dernier, et point de passage illégal créé par le Maroc vers l’Afrique de l’Ouest.
Le pistoléro médiatique du Makhzen refuse par ailleurs de voir en la normalisation des relations entre le Maroc et l’entité sioniste une des raisons essentielles à la base de la décision de rupture des relations diplomatiques avec le voisin de l’Ouest. Un voisin « enhardi » notamment par la reconnaissance unilatérale de l’ex président américain de sa prétendue souveraineté sur le Sahara occidental.
Le zèle déployé par François Soudan n’est guère étonnant. Pas si surprenant que ça de la part d’un pilier d’une entreprise de presse qui ne sépare pas toujours publireportages rétribués et reportages, et qui maîtrise, à la perfection et quand cela arrange ses intérêts financiers, le journalisme de connivence.
En 2017, suite à la publication d’une Une du magazine qui a fortement déplu au Palais royal après les attentats terroristes de Barcelone et de Cambrils, perpétrés par des terroristes marocains, François Soudan est discrètement allé à Rabat présenter ses plates excuses au cabinet du roi. Après la parution de cette Une illustrée par un drapeau marocain dans lequel on pouvait distinguer les visages des terroristes, avec la mention « born in Morocco », plusieurs contrats publicitaires avaient été annulés. 200.000 euros pour chaque contrat ! Il a alors supplié le cabinet de les rétablir et a obtenu gain de cause, selon des publications confidentielles françaises.