La moudjahida Fatiha Zemmouchi est un symbole de la lutte de la femme algérienne contre le colonialisme français, avec ses sacrifices et ses actes héroïques à la fois comme fidaï dans la ville d’Oran et combattante dans les maquis.
Née en 1938 à Mascara et fille du savant Saïd Zemmouchi, membre de l’association des oulémas algériens, la moudjahida a consacré sa vie, depuis son enfance, à la lutte et à la résistance contre le colonialiste français. Elle représente l’exemple de la femme attachée à la cause nationale, fortement influencée par son environnement familial empreint de nationalisme.
Après une scolarisation dans les cycles primaire et moyen qu’elle a passée au quartier mythique de Mdina Jdida, elle a rejoint le Collège moderne des jeunes filles (Lycée Lotfi, actuellement) pour suivre des études secondaires, avant de répondre à l’appel du Front de libération nationale (FLN) pour la grève du 19 mai 1956.
Mme Zemmouchi relate cette période à l’APS: « nous étions cinq ou six filles algériennes dans cet établissement éducatif, dont Bedra Baka, Aouïcha Zelmat, Houaria Bensalah. Nous distribuions les tracts de l’appel à la grève afin qu’il trouve un large écho dans les milieux des étudiants et élèves algériens. Nous avons répondu à l’appel du FLN et arrêté les études, mais après la grève nous avons toutes été expulsées du lycée ».
L’expulsion du lycée n’a pas affecté Fatiha Zemmouchi plus que jamais décidée à prendre part à la lutte armée contre le colonialiste français. Elle a entamé les contacts avec les militants du FLN pour l’aider à rejoindre le maquis.
Son vœu fut exaucé lorsqu’elle a été chargée par le moudjahid Ahmed Benalla, dit « Si Bouzid » qui supervisait les réseaux du Fida à Oran avec le jeune Chahid Ali Cherfaoui, de l’aider à exécuter des opérations de fida, couronnées de succès. Elle était chargée du ravitaillement, puis a appris les soins infirmiers auprès du défunt docteur Mohamed Seghir Nekkache.
En compagnie du chahid Ali Cherfaoui, Fatiha Zemmouchi a participé à quatre opérations de fida réussies. Sur décision de Hadj Benalla, Fatiha Zemouchi a été mutée au centre de commandement de la révolution d’Aïn Tedles, à Mostaganem, où elle a appris le maniement des armes à feu en cinq jours seulement.
Fatiha Zemmouchi fût arrêtée en 1956, en compagnie de plusieurs moudjahidine et moudjahidate, notamment Khadidja Khatir, Amaria Oudrighi, Kebdani Fatima et Ahmed Latrache Senouci.
Transférés à la prison de Mostaganem, ils seront sauvagement torturés par leurs tortionnaires français. Fatiha se souvient encore des blessures profondes et des maladies causées par les pratiques monstrueuses du colonialiste.
Fatiha et ses collègues sont restées environ un mois à la prison de Mostaganem, sans cesser un seul instant leur rôle de militantes, en sensibilisant les prisonnières sur la nécessité de poursuivre la lutte.
Après leur condamnation à six ans de prison, elles ont été transférées à la tristement célèbre prison de « Rio Salado » (El-Malah actuellement), dans la wilaya d’Aïn Temouchent, où commença un autre cycle de tortures qui s’est poursuivi jusqu’à la période de pré-indépendance.
« Nos tortionnaires s’ingéniaient à nous torturer physiquement et moralement. Rien ne les arrêtait, ni la maladie ni la vieillesse », se souvient-elle, en évoquant avec émotion la prisonnière Saâdia, une femme de 74 ans, arrêtée par les soldats français qui ont tué son époux, son fils et son frère devant ses yeux.
« Cette femme héroïque a coupé sa langue pour ne pas parler sous la torture. Elle est devenue le symbole de la femme algérienne héroïne à tous les niveaux », précise-t-elle.
Fatiha Zemmouchi a enduré les pires méthodes de torture durant six années d’incarcération. Elle s’en souvient, les larmes abondantes.
La mort de son père, Cheikh Saïd Zemmouchi, qu’elle n’avait pas vu pendant de longues années, a eu un profond effet sur elle alors qu’elle était en prison. Elle a appris son décès par une lettre que sa tortionnaire française lui a remis, en lui disant avec des sarcasmes: « j’ai une bonne nouvelle pour toi ».
« C’était un moment de profonde tristesse. Les prisonniers du bâtiment réservé aux hommes ont commencé à réciter le Saint Coran à voix haute et tous ont accompli la prière de l’absent à la mémoire de mon père, chose qui m’a profondément et fièrement marquée », relate Fatiha Zemmouchi.
Après le recouvrement de l’indépendance, la moudjahida a travaillé à la commune d’Oran pendant près de deux années. Membre de l’Union nationale de la femme algérienne, elle a participé, dans ce cadre, à la promotion de la femme, à sa sensibilisation et à sa prise en charge, à travers ses déplacements continus à différentes régions du pays.
Chargée des affaires sociales au sein de l’organisation féminine, elle s’est attelée à prendre en charge les femmes de chouhada, notamment sur les plans administratifs.