– Le moudjahid Yacef Saadi, décédé vendredi à Alger à l’âge de 93 ans, est considéré comme l’un des architectes de la Bataille d’Alger, ayant combattu l’armée coloniale, mais aussi le premier producteur algérien privé de cinéma qui a créé la première société de production cinématographique algérienne « Casbah films ».
Cette société aura produit quatre films, le documentaire « Main libre » en 1964, « La bataille d’Alger » en 1966, « L’étranger », adaptation du célèbre roman d’Albert Camus en 1967, et « Trois pistolet contre César » en 1967 reconnu pour être le premier et unique western africain et arabe, selon la cinémathèque algérienne.
Avec la production de « La bataille d’Alger », Yacef Saadi aura marqué le cinéma algérien par une oeuvre dont le scénario, signé par l’Italien Franco Solinas, a été puisé dans le premier livre du moudjahid « Souvenirs de la bataille d’Alger, décembre 1956- septembre 1957 ».
Dans ce film réalisé par l’italien Gillo Pontecorvo et qui a reçu le Lion d’or de la Mostra de Venise et le Prix Fipresci (Prix attribué par un jury de critiques cinématographique), Yacef Saadi a également tenu à jouer son propre rôle. Le film avait également reçu de nombreux prix aux Etats-Unis, en France, au Japon et au Royaume-Uni.
En 1967, la société Casbah Films est également coproducteur du film « L’étranger », réalisé par le cinéaste italien Luchino Visconti sur la base d’une adaptation du célèbre roman d’Albert Camus, et de « Trois pistolet contre César » réalisé par Enzo Peri.
Selon la cinémathèque algérienne, Yacef Saadi s’est retiré du paysage cinématographique après avoir cédé gracieusement son matériel au producteur public Oncic, mais le film « La bataille d’Alger » reste l’œuvre algérienne la plus regardée et la plus sollicitée par les cinémathèques et universités du monde.
Il a également publié un autre ouvrage en trois tomes sur son parcours militant lors de la « Bataille d’Alger » en 1982 qui sera réédité de nombreuses fois.
Né en 1928 à la Casbah d’Alger, Yacef Saadi a obtenu un certificat d’étude primaire. Après la réquisition de son école, il arrête ses études à l’âge de 14 ans pour travailler dans la boulangerie familiale avec son père, qui était un point de contact important entre les militants du Parti populaire algérien (PPA).
Yacef Saadi a, ainsi, rejoint de 1947 à 1949, l’Organisation spéciale (OS), l’aile paramilitaire du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD) où il était considéré comme l’un de ses combattants les plus en vue de la région d’Alger.
En 1954, date du déclenchement de la Révolution algérienne, Yacef Saadi, accompagné des dirigeants du Front de libération nationale (FLN),a été chargé de constituer un groupe de commando prêt à entrer en action. Il a abrité dans sa maison de la Casbah des révolutionnaires et militants, ainsi que des dirigeants de la Révolution à l’image de Krim Belkacem et Abane Ramdane.
Il a été désigné responsable de l’aile militaire de la zone militaire autonome, et suite à son succès sur le terrain, les dirigeants de la Révolution ont décidé de focaliser la lutte au centre d’Alger, où se trouvent la presse internationale et les autorités coloniales officielles.
Le moudjahid Yacef Saadi a été, ainsi, nommé commandant de la Zone autonome d’Alger en 1957. Il a contribué en compagnie de Hassiba ben Bouali, Ali Lapointe et autres feddayin à l’intensification de l’action de « guérilla » dans la capitale.
Yacef Saadi a poursuivi sa lutte armée jusqu’à son arrestation le 23 septembre 1957, subissant les pires sévices et tortures. Condamné à mort, la peine n’a pas été exécutée. Yacef Saadi a été libéré après le cessez-le-feu.