Le monde artistique algérien est en deuil. Baya Bouzar, connue sous le pseudonyme de Biyouna, icône du septième art algérien et figure majeure de la scène culturelle maghrébine, s’est éteinte mardi 25 novembre 2025 à Alger à l’âge de 73 ans des suites d’une longue maladie, selon l’annonce de la télévision publique algérienne.
Née le 13 septembre 1952 dans le quartier populaire de Belouizdad (anciennement Belcourt) à Alger, Biyouna a marqué l’imaginaire collectif algérien dès 1973, à l’âge de 19 ans seulement, grâce à son interprétation mémorable dans le feuilleton télévisé culte « Al-Hariq » (« L’incendie »). Cette production emblématique a constitué le tremplin d’une carrière qui traversera plus de cinq décennies, établissant l’artiste comme une voix authentique du peuple algérien.
Le courage d’une artiste durant la décennie noire
La dimension la plus remarquable du parcours de Biyouna réside sans doute dans sa résilience durant la période tumultueuse des années 1990. Alors que la violence terroriste contraignait de nombreux intellectuels et artistes à l’exil, l’actrice fit le choix courageux de demeurer en Algérie, refusant catégoriquement de fuir son pays malgré les menaces pesant sur le monde culturel. Ce n’est qu’en 1999, avec le retour progressif de la paix, que Biyouna franchit les frontières nationales pour élargir son horizon artistique.
Une reconnaissance internationale sous la direction de Nadir Moknèche
Sa carrière internationale prend un tournant décisif grâce à sa collaboration avec le cinéaste franco-algérien Nadir Moknèche. Ce dernier lui confie des rôles majeurs qui révéleront son talent au-delà des frontières algériennes. Au Maroc, elle incarne avec brio le personnage principal dans « Le Harem de Madame Osmane », avant d’interpréter une ancienne danseuse dans « Viva Laldjérie », puis une arnaqueuse dans « Délice Paloma ». Ces performances cinématographiques ont démontré l’étendue de son registre interprétatif et sa capacité à incarner la complexité de la condition féminine maghrébine.
Hommages et reconnaissance nationale
Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a tenu à exprimer « sa profonde tristesse suite à la perte d’une des personnalités les plus illustres de la scène culturelle nationale », rendant hommage à l’apport considérable de Biyouna au rayonnement du cinéma algérien. Cette reconnaissance officielle souligne l’importance de l’héritage artistique laissé par l’actrice, qui aura su concilier authenticité populaire et excellence artistique.
Avec la disparition de Biyouna, c’est une page de l’histoire culturelle algérienne qui se tourne. Son œuvre demeure un témoignage précieux de la vitalité créative algérienne et de la capacité de l’art à résister aux périodes les plus sombres. Figure de proue d’un cinéma engagé et populaire, elle laisse derrière elle un héritage artistique qui continuera d’inspirer les générations futures d’artistes maghrébins.
Sara Boueche
