Si votre enfant peine à se lever le matin, pleure, vomit, s’gite dans tous les sens, refuse d’entrer dans son établissement scolaire !!! Ne le forcez pas et consultez rapidement un pédopsychologue.
Aujourd’hui c’est la rentrée. Synonyme d’excitation et de joie pour certains, de stress et d’anxiété pour d’autres qui, pour des raisons irrationnels, éprouvent une angoisse extrême à l’idée d’aller à l’école, au point parfois de ne plus pouvoir du tout s’y rendre.
La phobie scolaire, pour un enfant ou un adolescent, est une situation dans laquelle l’école devient une source de souffrance qui dépasse ses ressources. On est donc bien loin d’un simple caprice ou d’un laxisme éducatif comme on l’entend malheureusement trop souvent.
Dans cet entretien, notre spécialiste Nora Benkermi Birem, psychologue hypnothérapeute et constellatrice familiale, nous dit tout sur cette phobie de l’école et sur les moyens d’aider votre enfant à s’en libérer afin d’aborder la rentrée avec davantage de sérénité.
S.T : Qu’est ce que la phobie scolaire ?
La phobie scolaire, autrement appelée « Refus Scolaire Anxieux : RSA » n’est pas, à proprement parler, une pathologie, elle ne se définit pas comme une entité clinique précise, mais plutôt comme un symptôme donnant l’alerte sur la présence d’un ou de plusieurs troubles sous-jacents.
Le RSA se définit comme étant une réticence à aller à l’école en lien avec une forte détresse émotionnelle qui se manifeste le plus souvent par de l’absentéisme scolaire. C’est une vraie urgence thérapeutique, parce qu’il s’agit d’une entité clinique plutôt fréquente et sous diagnostiquée et aussi, parce que les conséquences, lorsqu’il y a chronicisation, peuvent être très graves pour l’avenir des jeunes et des adolescents.
S.T : A quel âge peut se manifester le RSA ?
On parle de plusieurs pics de fréquence souvent liés aux cycles scolaires :
* Vers 5-7 ans (maternelle, entrée en primaire)
* Vers 11 ans (entrée au collège et préadolescence)
* Vers 15 ans à l’adolescence
S.T : Quelles peuvent en être les causes ?
– Elles sont nombreuses et les identifier précocement chez un enfant manifestant un RSA aidera à sa prise en charge adéquate. On citera les plus fréquentes :
* Anxiété de séparation liée à l’autonomie affective de l’enfant avec des parents trop symbiotiques.
* Phobie sociale : Version pathologique de la timidité, consiste à avoir peur en situation sociale quand l’enfant est soumis aux regards des autres : en classe, dans la cour de récréation…
* Trouble panique avec agoraphobie : Quand l’enfant se retrouve dans des endroits où des situations d’où il est difficile de s’échapper : cour de récréation agitée, grandes salles de cours, passage dans des couloirs longs et bruyants…
* Traumatisme : Quand l’enfant a été ou est victime d’agression, de harcèlement, de racket, de jeux dangereux ou de maltraitance, il peut développer un syndrome post traumatique l’empêchant d’aller à l’école
* Troubles neurodéveloppementaux : Développement de la communication et des interactions sociales (autisme), développement intellectuel (retard mental), développement de l’attention (TDAH), troubles de l’apprentissage (dyslexie, dysorthographie…)
* Trouble oppositionnel : L’enfant recherche activement son autonomie affective et souvent de manière agressive ce qui le pousse à refuser violemment d’aller à l’école pour s’imposer face à ces parents qui aggravent la situation en cédant à sa volonté.
* Anxiété de performance : Souvent résultat des pressions parentales poussant les enfants à toujours courir après la première place et à vouloir être les meilleurs, créant ainsi chez eux une peur de l’échec et de décevoir.
S.T : Quels sont les symptômes et les caractéristiques du RSA ?
– L’enfant subit de véritables attaques de panique au moment d’aller à l’école : Forte angoisse, pleurs, cris, colère, avec des manifestations somatiques tels que : douleurs abdominales, céphalées, pâleur, nausées, vomissements, tremblements…
– Les symptômes disparaissent dès que les parents cèdent à la demande de leur enfant de rester à la maison
– L’enfant est calme pendant les jours sans école.
– L’enfant exprime un intérêt pour le travail scolaire qui est vite dissipé quand l’enfant est submergé par la peur.
S.T : Quelles conséquences sur la vie de l’enfant ?
Le RSA représente un véritable handicap pour l’enfant et ses répercussions peuvent être désastreuses sur les court, moyen et long termes :
* Absentéisme, échec scolaire
* Isolement, faible estime de soi, désocialisation
* Conduites addictives
* Aggravation des troubles sous-jacents et risque d’apparition de nouveaux troubles anxieux
* Syndrome dépressif
* Échec professionnel à l’âge adulte avec difficultés dans les relations affectives et sociales
* Marginalisation progressive
S.T : Comment les parents peuvent-ils aider leur enfant ?
Je ne le dirai jamais assez, les parents sont les accompagnateurs de leurs enfants ici-bas, ils sont leurs guides, leurs mentors. Leur rôle est de soutenir leurs enfants jusqu’à ce que ces derniers puissent quitter le nid familial en toute assurance : voler de leurs propres ailes pour faire leur bout de chemin et vivre leurs expériences dans la joie comme dans la douleur. Le lien parents-enfants reconsidéré, le parent sort alors de son obnubilation et peut enfin voir son enfant d’un nouvel œil :
*Il n’est pas normal qu’un enfant s’absente de l’école sans raison valable, le voir et l’admettre
* Ne pas encourager l’isolement social en cédant à la demande de l’enfant de rester à la maison dans sa zone de confort
* Parler régulièrement à son enfant et se renseigner de ses journées à l’école et ailleurs, cela aidera à comprendre le problème ou à le prévenir (harcèlement, extorsion…)
* Encourager l’autonomie de l’enfant en favorisant les loisirs d’apprentissage, l’activité avec les pairs et la séparation
* Éviter d’être trop exigeants pour la scolarité (choisir des écoles élitistes, exiger des résultats extraordinaires, dévaloriser l’enfant si les résultats ne sont pas ceux espérés…)
* Travailler sur l’hygiène de vie (sommeil, écrans…)
* Ne pas hésiter à consulter et à demander de l’aide
S.T : Comment se fait la prise en charge de la phobie scolaire ?
La prise en charge implique une alliance entre parents, thérapeutes (pédopsychiatrie, psychologue, orthophoniste…) et enseignants, et a pour objectif la préscolarisation
Il est important de diagnostiquer le (les) trouble(s) sous-jacent(s) et établir un traitement spécifique pour chacun de ces troubles
* Faire des bilans (psychologiques, orthophoniques, psychomoteurs) si nécessaire pour repérer d’éventuels troubles des apprentissages
* Informer l’enfant et sa famille sur le trouble
* Mettre en place une psychothérapie (thérapie cognitivo-comportementale, hypnose…)
* Traitements médicamenteux parfois nécessaire mais limités
* Soutien de la famille et déculpabilisation
* Informer la famille des complications possibles
Entretien réalisé par : Sara Boueche