Dans un effort crucial pour la préservation de son patrimoine historique, Annaba s’apprête à franchir une étape significative. L’emblématique hôtel de ville, témoin silencieux de l’histoire de l’ancienne Bône, fait l’objet d’une demande de classement au patrimoine national, une initiative portée par la direction de la culture et des Arts de la wilaya.
Cet édifice majestueux, qui porte la signature de l’architecte Denis Marius Toudoire, se distingue par son style éclectique, marqueur d’une période charnière entre tradition et modernité architecturale. Au-delà de sa valeur esthétique indéniable, le bâtiment incarne un chapitre important de l’histoire locale, bien que son état actuel suscite de vives inquiétudes parmi les défenseurs du patrimoine.
Les cicatrices du temps et de l’histoire sont particulièrement visibles sur cette structure centenaire. Son toit, autrefois paré d’ardoises naturelles rectangulaires, porte encore les stigmates d’un incendie criminel perpétré par l’OAS en 1962. Les colonnes de la façade, jadis d’un gris distinctif, ont perdu leur authenticité suite à une intervention malheureuse de sablage en 2001. Plus préoccupant encore, des fissures importantes lézardent désormais ses murs, témoignant d’une dégradation accélérée.
Face à cette situation alarmante, un plan d’action en deux volets a été élaboré. La première phase, considérée comme prioritaire, vise la restauration extérieure du bâtiment, avec une attention particulière portée à la toiture. Le classement au patrimoine national permettrait d’encadrer juridiquement ces travaux, conformément aux dispositions de la loi n° 98-04 relative à la protection des biens culturels.
Cette démarche s’inscrit dans une perspective plus large de sauvegarde du patrimoine architectural d’Annaba. La ville recèle d’autres joyaux historiques en attente de reconnaissance, notamment «Dar El Bacha» et «Dar El Kadhi», vestiges précieux de la période ottomane. Le sort de l’hôtel de ville pourrait ainsi créer un précédent favorable pour la préservation de l’ensemble du patrimoine de l’antique Hippone.
La proposition de classement représente donc une lueur d’espoir pour la sauvegarde de ce patrimoine en péril. Elle offre l’opportunité de réconcilier l’hôtel de ville avec son passé prestigieux tout en lui assurant un avenir à la hauteur de sa valeur historique et architecturale. Cette reconnaissance nationale pourrait enfin donner à ce joyau architectural la protection et l’attention qu’il mérite, garantissant ainsi sa transmission aux générations futures.
Sara Boueche