C ’est lors des journées manga qui se sont déroulées à Annaba que nous avons eu l’opportunité de rencontrer Jimmy Props. Sa présence et son travail ont immédiatement capté notre attention.
Jimmy,de son vrai nom Djamel Takaline, est un créateur de costumes et d’accessoires Cosplay exceptionnel mais aussi des décors dignes du grand écran. Basé à Alger, il est un créateur visionnaire qui a su transformer sa passion en une carrière florissante en devenant une véritable référence dans le domaine.
Depuis 2012, Jimmy repousse les limites de cet art en Algérie, transformant des matériaux ordinaires en créations extraordinaires qui captivent l’imagination. Tout a débuté avec Iron Man. Ce premier costume Cosplay occupe une place particulière dans son cœur et sa carrière. C’est avec cette réplique du célèbre héros Marvel qu’il a fait ses débuts au Festival International de la Bande Dessinée d’Alger (FIBDA), remportant son tout premier prix. Ce succès initial a été le catalyseur d’une passion dévorante et d’un engagement sans faille envers son art. Jimmy s’est lancé le défi de créer un nouveau costume toujours plus impressionnant pour chaque édition du FIBDA, du mythique Robocop à ses propres créations originales. Son travail acharné et sa créativité ont porté leurs fruits. Cette année, il a une fois de plus prouvé son talent en remportant le titre convoité du meilleur costume, ajoutant ainsi un nouveau fleuron à sa déjà impressionnante collection de récompenses dans ce prestigieux concours.
Tel un maître et son apprentie prodige, Jimmy et sa nièce Meriem Bensaâdi, alias Meryouma, âgée de 10 ans, forment un duo créatif imbattable dans l’art du Cosplay. Partageant la même passion et un talent inné pour la conception de costumes, cette jeune virtuose suit les traces de son oncle avec brio. Son talent précoce a d’ailleurs été reconnu cette année au FIBDA, où elle a décroché le prix du meilleur Cosplay, prouvant que la créativité et l’excellence n’ont pas d’âge.
Le Cosplay, longtemps considéré comme un simple passe-temps, émerge aujourd’hui comme une forme d’expression artistique à part entière, avec un potentiel inexploité pour révolutionner l’industrie audiovisuelle algérienne. Des effets spéciaux aux décors de cinéma, en passant par la publicité et la production télévisuelle, les compétences uniques des créateurs Cosplay comme Jimmy pourraient bien être la clé pour insuffler une nouvelle vie créative dans ces secteurs.
Dans cette interview, nous explorerons comment l’expertise de Jimmy et de ses pairs pourrait transformer le paysage des effets spéciaux en Algérie. Nous discuterons de la nécessité de donner plus de visibilité à ces artistes talentueux, de l’importance de créer davantage d’événements dédiés au Cosplay à travers le pays, et de la manière dont cette forme d’art peut devenir un atout majeur pour l’industrie cinématographique algérienne.
S.T : Pour commencer, pourriez-vous nous parler de votre parcours et de ce qui vous a amené à devenir créateur de costumes Cosplay ?
Jimmy :-Bien sûr ! Mes débuts dans le Cosplay sont profondément enracinés dans mon enfance des années 90. J’ai grandi en étant bercé par des dessins animés emblématiques comme Goldorak, et Dragon Ball. Ces univers ont vraiment nourri mon imaginaire et m’ont donné envie de faire partie de ces mondes fantastiques.
Plus tard, je suis devenu un grand fan des comics Marvel et DC. Je rêvais de devenir un super-héros comme ceux que je voyais dans ces bandes dessinées. C’est ce désir qui m’a naturellement conduit vers le Cosplay. J’ai commencé par créer des costumes simples, en essayant de reproduire les tenues de mes personnages préférés. Avec le temps, j’ai perfectionné mes techniques, appris à travailler différents matériaux, et mes costumes sont devenus de plus en plus élaborés. Ce qui n’était au départ qu’un hobby s’est transformé en une véritable vocation. Aujourd’hui, je suis fier de pouvoir dire que je vis de ma passion en créant des costumes pour d’autres passionnés et en participant à divers événements autour du Cosplay.
C’est fascinant. Pouvez-vous nous décrire le processus de création d’un costume Cosplay, de la conception à la réalisation finale ?
Le processus commence par une recherche approfondie sur le personnage que je vais incarner. Je collecte des références visuelles, étudie les matériaux et les techniques nécessaires. Ensuite, je dessine des croquis pour visualiser le costume. Une fois le design finalisé, je passe à la phase de création. Cela inclut la sélection des matériaux, la découpe des patrons, la couture, et parfois l’ajout d’éléments comme des accessoires ou des armures. La phase finale est l’essayage et les ajustements pour s’assurer que le costume est confortable et fidèle au personnage.
Quels sont les défis spécifiques que vous rencontrez en tant que créateur de costumes Cosplay en Algérie ?
Les défis sont nombreux. Le premier est l’accès aux matériaux de qualité. En Algérie, il peut être difficile de trouver certains tissus ou accessoires spécifiques. De plus, le manque de reconnaissance et de soutien pour les arts créatifs peut être un obstacle.
Comment avez-vous préparé votre participation au FIBDA et qu’est-ce que ces victoires signifient pour vous ?
Préparer ma participation au FIBDA a été un processus intense mais gratifiant. J’ai passé des mois à concevoir et à fabriquer mes costumes, en m’assurant que chaque détail était parfait. J’ai également travaillé sur ma performance pour capturer l’essence du personnage que j’incarnais. Remporter les prix au FIBDA, avec ma nièce Meryouma a été une expérience incroyable. Cela signifie beaucoup pour moi, car c’est une reconnaissance de mon travail et de ma passion. Cela m’encourage à continuer à repousser mes limites.
Comment se porte l’univers du Cosplay en Algérie ? Et comment expliquer l’engouement de la jeunesse annabie pour le manga?
L’univers du Cosplay en Algérie est en pleine expansion, et c’est vraiment passionnant à voir! Ces dernières années, nous avons observé une croissance significative de la communauté Cosplay, particulièrement chez les jeunes. Quant à l’engouement de la jeunesse annabie pour le manga, je pense qu’il s’explique par plusieurs facteurs. Tout d’abord, les mangas offrent des histoires riches et variées qui touchent à des thèmes universels auxquels les jeunes peuvent s’identifier. De plus, l’esthétique unique du manga et de l’anime a un fort pouvoir d’attraction.
En tant que créateur pionnier de costumes et accessoires Cosplay en Algérie, quels changements aimeriez-vous voir pour mieux valoriser le travail des cosplayers et leur offrir plus d’opportunités?
Je pense qu’il est crucial de développer davantage d’événements où les cosplayers peuvent se réunir, être encouragés à créer et être récompensés pour leur travail. Actuellement, beaucoup de passionnés investissent énormément de temps, d’énergie et d’argent dans la création de costumes et d’accessoires impressionnants, pour finalement les ranger dans un placard après quelques utilisations. C’est frustrant et peu gratifiant. Ce que je voudrais voir, c’est une reconnaissance accrue de notre art, notamment dans l’industrie du cinéma et de l’audiovisuel. Les créateurs de costumes et de décors cosplay ont des compétences uniques qui pourraient être extrêmement précieuses pour ces secteurs. L’Algérie n’a rien à envier aux étrangers. Je me pose d’ailleurs la question pourquoi faire appel à des étrangers pour les décors de cinéma et les costumes alors qu’il existe des talents locaux prêts à relever le défi et apporter une valeur ajoutée significative à la production audiovisuelle et cinématographique nationale. Imaginez si nous étions régulièrement sollicités pour des projets cinématographiques ou des productions télévisuelles ? Cela changerait complètement la donne. Non seulement cela offrirait de nouvelles perspectives de carrière aux cosplayers talentueux, mais cela élèverait également le statut du cosplay en tant que forme d’art et de métier à part entière. Je crois fermement que si on nous ouvre les portes de ces industries, nous pourrions apporter une créativité et un savoir-faire uniques qui enrichiraient considérablement les productions visuelles. En fin de compte, il s’agit de créer un écosystème où notre passion et nos compétences sont valorisées, utilisées et récompensées de manière continue, plutôt que d’être simplement appréciées de façon éphémère lors d’événements ponctuels.
Avez-vous des conseils à donner à ceux qui souhaitent se lancer dans la création de costumes Cosplay?
Mon premier conseil serait de suivre votre passion et de ne pas avoir peur de commencer petit. Le Cosplay est un art qui demande du temps et de la pratique. Commencez par des costumes simples et perfectionnez vos techniques au fur et à mesure. Participez à des événements et n’hésitez pas à demander des conseils à des cosplayeurs plus expérimentés. La clé est de rester passionné et de toujours chercher à s’améliorer.
Comment voyez-vous l’avenir du Cosplay en Algérie ?
Avec plus de soutien et de reconnaissance, je pense que le Cosplay peut devenir une partie intégrante de la culture populaire algérienne. J’espère voir plus d’événements, de compétitions et de collaborations entre les cosplayeurs algériens et ceux du monde entier.
Sara Boueche