Kaïs Saïed veut-il tourner le dos aux partenaires traditionnels?

Rejetant les pressions exercées par les grandes puissances pour l’amener à rétablir rapidement le fonctionnement normal des institutions, le président tunisien développe un discours souverainiste qui trouve un certain écho auprès de quelques médias et groupes politiques. Le désormais superpuissant chef de l’exécutif semble également vouloir déconnecter son pays de l’Union européenne et des États-Unis pour l’arrimer à d’autres puissances.
«La Tunisie est un État indépendant qui n’accepte pas les ingérences dans ses affaires intérieures et refuse que sa souveraineté soit mise sur la table des négociations […]». C’est le président du pays du Jasmin, Kaïs Saïed, qui a tenu ces propos, le 14 octobre 2021, lors de la première réunion du conseil du nouveau gouvernement dirigé par Mme Najla Bouden.
Ces mots s’adressaient fort probablement à Donald Blome, ambassadeur américain en Tunisie, que le chef de l’exécutif avait reçu le jour même afin d’«exprimer le mécontentement de la Tunisie pour l’inscription de la situation tunisienne à l’ordre du jour des travaux du Congrès américain», de «clarifier un certain nombre de sujets», et de «lever les ambiguïtés que propagent les ennemis de la démocratie».
Vague souverainiste
Si cette vague souverainiste n’est pas nouvelle en Tunisie, elle s’est accrue au cours des dernières semaines en se propageant au sein d’une partie de la classe politique, de la société et des médias. Elle est étroitement liée aux développements que connaît le pays depuis quelques mois, plus particulièrement après le coup de force du 25 juillet dernier – par lequel le chef de l’État tunisien avait mis fin au pouvoir du mouvement islamiste Ennahdha – et, surtout, au changement d’attitude des grandes puissances sur ce sujet.
Cet accès souverainiste s’accompagne d’appels du président Saïed à «compter sur soi-même d’abord». Cela signifierait-il qu’il s’agirait de se passer, au besoin, de l’aide de ceux qui pourraient fermer le robinet des financements et de l’assistance financière à l’avenir– en particulier les États-Unis, l’Union européenne et les bailleurs de fonds multilatéraux – si le chef de l’État tunisien persistait dans son one-man-show politique et dans l’instauration progressive d’un régime autoritaire en Tunisie? Ce n’est pas exclu.
En effet, le chef de l’État tunisien donne aujourd’hui la nette impression de vouloir faire exactement ce que son ennemi juré, le mouvement Ennahdha, a tenté de faire au cours des onze dernières années: déconnecter la Tunisie de ses partenaires traditionnels, plus particulièrement de l’Union européenne et, à un degré moindre, des États-Unis, pour l’arrimer à d’autres puissances sur un plan économique, financier, politique et culturel.
Pour le parti islamiste et son président, Rached Ghannouchi, les partenaires «de rechange» sont la Turquie, le Qatar, la Libye de l’Ouest, la Chine et les grands pays musulmans comme l’Indonésie, la Malaisie, etc.

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